Furiosa (Tinted Black and Chrome) : Un choix conseillé pour une première immersion ?

Publié le par la Rédaction



Furiosa - Une Saga Mad Max (2024) reste une œuvre intense, une plongée sensorielle dans un univers apocalyptique, où règnent chaos et brutalité. Dès sa sortie, le film a marqué par son esthétique unique et son rythme effréné, tout en ouvrant de nouvelles perspectives dans la saga Mad Max. Notre test complet de l'édition 4K Ultra HD Blu-ray l'aborde abondamment : l'oeuvre s’inscrit dans la continuité de la franchise mais en ouvrant de nouvelles perspectives et en développant ses propres singularités. Avec surtout un irréprochable master 4K.

Cependant, un débat intéressant s'est cristallisé autour de la version alternative : la fameuse Tinted Black and Chrome. Cette version, disponible en dématérialisé depuis l'été dernier sur de nombreux marchés et incluse en exclusivité dans l'édition 4K Ultra HD Blu-ray spéciale Fnac du 2 octobre, soulève des questions fondamentales.

Nous aborderons certainement un test complet de cette version lorsqu'elle fera l'objet d'une sortie en édition 4K UHD individuelle. Mais la question nous a été posée par plusieurs d'entre vous : qu'avons-nous pensé de cette version ? Et surtout : est-ce une voie opportune pour découvrir ce film, dans l'hypothèse où vous n'auriez encore jamais vu ce 5ème opus ?

 

 

Tinted ? La couleur réduite à l'essentiel

La version "Tinted Black & Chrome" de George Miller ne se contente pas d’offrir un noir et blanc classique. Ce qui distingue véritablement cette version, c'est l'ajout de cette nuance : Tinted. Contrairement à Fury Road (version Black & Chrome), où le monochrome était total, Furiosa s’enrichit ici de touches de couleur savamment placées et rompant avec les nuances de gris omniprésentes. Le vert éclatant du paradis perdu, les fusées de détresse rouge sang, ou encore la pêche, fortement symbolique, figurent parmi les principaux exemples qui conservent leurs couleurs dans un environnement lui majoritairement désaturé. Ces touches sélectives, qu'on observe également lors des scènes nocturnes et leurs bleus caractéristiques, ne sont pas de simples embellissements ; elles s'intègrent avec soin au récit, ajoutant une dimension et suscitant des interrogations. Pourquoi ces couleurs ? Que signifient-elles ? Que révèlent-elles dans ce paysage ravagé ?

Cette approche singulière est d'abord déstabilisante. Le contraste entre le monochrome majoritaire et ces touches de couleur indélébiles génère une dissonance visuelle intrigante. Ces choix esthétiques posent énormément de questions. Ils n’ajoutent pas nécessairement une profondeur narrative supplémentaire, mais ils guident le regard vers des éléments censés être dignes d'attention. L'approche en noir et blanc a aussi ce mérite d'accentuer l'austérité palpable de l'univers de Furiosa tout en s'accordant avec la cadence épileptique de son montage. Les effets spéciaux, plus ou moins apparents dans la version en couleur — un sujet de débat — semblent davantage se fondre dans cette palette minimaliste. Le grain, ajouté en post-production, est surtout bien plus épais et rugueux sur cette version alternative.

Certains spectateurs y verront une nouvelle cohérence, voire une entrée idéale dans l'univers du film. Mais est-ce pour autant le canal légitime pour une première découverte de Furiosa ? Rien n'est moins sûr.

 

 

Le manque d'une vitalité essentielle

Car dans l’univers de Mad Max, la couleur n’est pas un simple ornement. Elle incarne l’énergie, la folie et la vitalité même du Wasteland. Les explosions de couleurs rouges vives, le bleu criant du ciel australien et les éclats aveuglants du soleil ne sont pas de simples éléments de décor ; ils sont essentiels à l’expérience, représentant la démesure et la frénésie d’un monde post-apocalyptique et de ses personnages. Particulièrement avec le format 4K Ultra HD Blu-ray et la mobilisation du Wide Color Gamut. En rendant silencieuses ces couleurs, la version Tinted Black and Chrome ôte une partie de cette énergie chaotique, laissant place à une toute autre atmosphère.

Ce choix crée un vide étrange, comme un gouffre béant dans un paysage déjà dévasté. C’est un peu comme observer un carnaval sans couleur : on perçoit le mouvement, mais la vie elle-même, débordante, si essentielle aux scènes de chaos, est absente. Et cette absence modifie profondément la manière dont le spectateur ressent l'aventure. L'intensité visuelle qui rendait Furiosa unique dans la version classique n'est pas forcément amoindrie. Mais elle n'est plus du tout de même nature. On en vient aussi à se demander : serait-il possible d’imaginer un traitement "Tinted" similaire pour le film précédent, Fury Road ? Ou bien est-ce précisément cette nuance de traitement qui distingue Furiosa de son prédécesseur ?

Car en choisissant de ne pas embrasser pleinement une version 100% monochrome, George Miller semble admettre à demi-mot que les thèmes explorés dans Furiosa nécessitent fondamentalement des couleurs pour s’exprimer en conservant leur pleine cohérence. Il y a une certaine hésitation, un aveu peut-être involontaire, qui laisse penser que le réalisateur même, connu pour ses choix audacieux, ne pouvait priver totalement ce cinquième volet de nuances colorées. Cela ne se traduit pas par une faiblesse ou une impuissance. Cela montre surtout que Furiosa n’est tout simplement pas comparable à Fury Road dans sa structure même. Ici, la couleur n’est pas un simple accessoire : elle est une force motrice, un vecteur de vie. Et elle élève les thèmes les plus significatifs, en lien avec les personnages, leurs évolutions et les éléments les plus symboliques du récit.

 

 

Un choix réservé aux initiés ?

Il apparaît légitime que la version Tinted Black and Chrome se présente comme une proposition artistique destinée à ceux qui souhaiteraient revisiter Furiosa sous un nouvel angle. C’est une perspective originale, une relecture qui attire l’attention sur des détails que la version classique pourrait parfois dissimuler derrière son caractère plus clinique et ses couleurs abondantes. Mais aux néophytes : prudence. Pour une première immersion dans ce volet, la version traditionnelle reste une voie de découverte plus accessible et certainement plus sereine pour apprécier les qualités de cette photographie telle qu'elle a été pensée initialement. C'est notre avis bien qu'au final... les goûts et les couleurs ne se discutent pas.

Et en HDR : ça donne quoi ?

Quant aux caractéristiques HDR de la version Tinted Black and Chrome. Sachez que ce n'est pas le même étalonnage. Les contrastes sont plus durs, plus agressifs, avec davantage de zones de blancs brûlés et d'ombres écrasées. Par contre, fondamentalement, cette version HDR (Tinted) ne propose pas un grand écart en termes d'intensités lumineuses. Nos mesures mettent en avant des valeurs très proches, avec un MaxCLL de 1097 nits (contre 1102 nits pour la version couleur), et une moyenne de pics de luminosité s'élevant à 567 nits (contre 506 nits en version classique).

Autre point : les couleurs qui persistent dans cette version "Tinted" exploitent beaucoup plus timidement l'espace du Wide Color Gamut. Ce sera à nuancer dans une analyse plus approfondie, mais elles restent pour la plupart cantonnées au gamut standard REC.709. Elles apparaissent bien plus timorées, loin des débordements explorés sur la version traditionnelle (voir notre analyse complète ici-même).