Test 4K Ultra HD Blu-ray : Duel (1971)

Synopsis

David Mann, un représentant de commerce, roule tranquillement sur une route californienne. Il se trouve bientôt bloqué derrière un énorme camion qui avance à faible allure et dégage une fumée gênante. David parvient à le doubler, mais le camion le rejoint et le dépasse à son tour. David pense qu'il s'agit là d'un jeu mais lorsque le conducteur du camion lui fait signe de passer, lui indiquant que la voie est libre alors qu'en fait un véhicule arrive à vive allure, il commence à avoir sérieusement peur et comprend que le conducteur du camion veut le tuer...

NB : Les comparatifs image (compression .jpg, 8-bit) sont strictement à usage illustratif et sont non représentatifs de ce que l'Ultra HD Blu-ray diffusera sur votre écran UHD HDR calibré.

Afin de mettre en évidence l'utilisation concrète du Wide Color Gamut (WCG) sur cette édition (voir tutoriel ici), les pixels qui se situent dans la gamme standard/BT.709 (confinés à l'intérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés ici entièrement désaturés. A l'inverse, ceux faisant partie de la gamme élargie BT.2020, exclusive au disque 4K Ultra HD Blu-ray (qui s'étendent à l'extérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés en couleur :

"Duel" de Steven Spielberg, sorti en 1971, est une oeuvre précoce mais déjà marquée par les motifs et le suspense qui deviendront la marque de fabrique du jeune réalisateur. Le protagoniste, David Mann, joué avec une vulnérabilité palpable par Dennis Weaver, se voit confronté sur la route à un adversaire inhabituel : un camion-citerne monstrueux et de toute évidence indomptable, dont la présence inflammable représente bien plus qu'une simple menace. Spielberg utilise ce camion titanesque non simplement comme un engin de poursuite, mais comme l'incarnation matérielle et presque démoniaque d'une énergie brute et martiale qui fait cruellement défaut à notre protagoniste.

Mann nous est d'abord présenté comme un personnage fragile et tourmenté, dépourvu de la prestance et confiance nécessaires pour régner en maître sur son existence pourtant bien ordinaire. Sa manière de rouler, l'incertitude palpable dans la façon où il mène son foyer et son incapacité à affirmer sa présence dans le monde extérieur le rendent plus proche de l'archétype d'une victime, s'abreuvant d'aspirines, que d'un héros intrépide. Cette caractérisation, loin d'être un cliché superficiel, revêt une importance capitale dans la compréhension de l'oeuvre. Le camion-citerne, dans sa furie impitoyable, incarne cet appel à l'action, cette énergie de feu dont Mann s'est distancé, et qu'il doit reconquérir. Chacune de ses tentatives d'éviter l'affrontement sera systématiquement contrecarrée par le retour du camionneur, le forçant peu à peu à accepter le défi et ne plus se voiler la face. L'enjeu est de reconquérir cette énergie combative au fondement de sa propre estime. Le tout : sans "exploser de durites"...

La course-poursuite, le combat de Mann contre cette machine infernale, ne relève pas simplement d'une question de survie, mais plutôt d'une lutte identitaire. L'environnement traversé, aride et isolé, évoquant la rudesse du combat à mener, sert de toile de fond au voyage au cours duquel Mann doit d'abord - en gardant l'oeil sur son retro-viseur - définir l'identité de son ennemi, puis affronter son Minotaure. Le démon sera terrassé, non par la fuite, mais par l'incrément d'une confrontation assumée et salvatrice. Spielberg, alors jeune réalisateur, avec une économie de moyens et un scénario resserré, présente une œuvre où la tension soutenue et cet affrontement inéluctable deviennent l'expression allégorique d'un combat profondément humain et universel.

Qualité Vidéo

Tourné à l'époque en 35mm, à l'aide de caméras Panavision & Arriflex 35, Duel (1971) avait fait l'objet d'une remasterisation ayant donné lieu à une précédente édition Blu-ray en 2015 de bonne facture. Le film débarque en 2023 pour la première fois au format 4K Ultra HD Blu-ray avec un nouvel étalonnage Dolby Vision, le tout de nouveau au ratio 1.85:1.

Selon toute vraisemblance, Universal est reparti sur la même base - un même scan des négatifs originaux - à partir de laquelle quelques ajustements ont été réalisés. A commencer par une géométrie et un cadrage légèrement corrigés, mais cela varie selon les plans. En effet, de nombreuses séquences sont sur ces registres absolument identiques à la précédente édition Blu-ray. Toujours est-il qu'il s'agit d'une base solide, et cette version en 2160p en retranscrit les qualités de façon plus intègre et fidèle. Inhérents à la photo d'origine, quelques plans restent en retrait, notamment celui à 34mn50 au restaurant. Mais globalement, Duel reste une oeuvre solide visuellement, avec une mise au point souvent aboutie. L'affinement de la définition reste subtil mais perceptible, aussi bien sur les plaques d'immatriculation, les plans larges (ces routes désertiques et arides), que sur les plans parfois ultra serrés sur le visage de notre héros contrarié. La compression est bien plus solide qu'autrefois, avec un grain 35mm plus fin et plus rigoureux. Mais il y a encore un terrain d'amélioration sur ce registre avec quelques plans capricieux. On pense aux ciels aperçus vers 26min50s où des artefacts sont visibles, ainsi qu'au sein du restaurant vers 40min10s.

Le film de Steven Spielberg, tourné presque entièrement en extérieur et sous une lumière diurne implacable, embrasse à bras ouverts une dynamique plus étendue grâce au HDR. La moyenne des pics lumineux, souveraine (de 471 nits), reflète l'intensité réhaussée et cette vivacité apportée aux contrastes. Les éclats spéculaires, l'impact visuel des surfaces métalliques et les réflexions brillantes du camion en ressortent avec des qualités supplémentaires d'intimidation. En Wide Color Gamut, les nuances de rouge prédominent - depuis la voiture même du héros jusqu'à la chemise de sa compagne lors d'un appel téléphonique. Et n'omettons pas les feux arrière du poids lourd, dont l'intensité rougeoyante - presque infernale - est particulièrement prononcée tout au long des scènes de course-poursuite.

Qualité Audio

Universal a profité de cette nouvelle sortie pour proposer un remixage de la version originale au format Dolby Atmos. Cette version est restituée avec un core TrueHD 7.1 (16-bit, 2987 kbps). Dès la séquence inaugurale, alors que nous suivons la trajectoire de la voiture de David Mann serpentant sur les routes américaines, le mixage Atmos, aussi précis qu'inventif, déploie toute sa capacité d’immersion. Utilisant de manière stratégique l’ensemble des enceintes et tirant profit des canaux de hauteur supplémentaires, l’audio reproduit fidèlement l'expérience de conduite, notamment lors des passages sous les structures des ponts et des tunnels. L'Atmos ajoute également une dimension verticale au timbre menaçant et oppressant du camion Peterbilt 281, véhicule devenu au fil du temps aussi iconique que les protagonistes du film, accentuant métaphoriquement son imposante stature et sa présence inquiétante. Le leitmotif sonore du camion, au moyen d'une dynamique aussi robuste qu'efficace, prend le contrôle du paysage sonore non seulement par sa masse mais aussi par ses coups de klaxon bien volumineux. Les interactions verbales conservent leur intelligibilité. Tandis que la bande-originale signée Billy Goldenberg, avec sa composition atypique et ses inclinaisons expérimentales, introduit des interludes apaisants dans une trame qui reste bien tendue. La VF, conserve le doublage de l'édition 2015, et un format inchangé : DTS 5.1 (768 kbps).

Contenu

- "Duel" version TV 1.33 (HD, , VOST, 74mn - mais dans une qualité indigne)
- Une conversation avec Steven Spielberg (35mn43)
- Steven Spielberg et le petit écran (9mn28)
- Richard Matheson : l'écriture de Duel (9mn24)
- Galerie de photos et d'affiches (3mn30)
- Bande-annonce

Conclusion

Déjà à 24 ans, Steven Spielberg imprimait sa marque indélébile dans le paysage cinématographique avec Duel (1971), œuvre à la fois modeste dans son envergure mais remarquable par sa construction ingénieuse et sa mise en scène habile. Le film tire avec élégance profit des avantages du format Ultra HD Blu-ray, se démarquant particulièrement grâce à un nouvel étalonnage en Dolby Vision et à un remaniement sonore en Dolby Atmos. Dommage que la version télévisée de 74 minutes qui accompagne ce vidéo disque n'ait pu faire l'objet d'une restauration plus rigoureuse.