Test 4K Ultra HD Blu-ray : Le Voyeur (1960)

Synopsis

Mark Lewis est cameraman dans un studio cinématographique. À ses heures perdues, il prend des photographies de nus, vendues sous le manteau dans des kiosques à journaux. Le père de Mark, scientifique de renom, consacra sa vie à l'étude de la psychologie de la peur, utilisant son propre fils comme cobaye. Mark, aujourd'hui adulte, est devenu un tueur fou, obsédé par la peur et qui filme l'agonie de ses victimes...

 

NB : Les comparatifs image (compression .jpg, 8-bit) sont strictement à usage illustratif et sont non représentatifs de ce que l'Ultra HD Blu-ray diffusera sur votre écran UHD HDR calibré.

Afin de mettre en évidence l'utilisation concrète du Wide Color Gamut (WCG) sur cette édition (voir tutoriel ici), les pixels qui se situent dans la gamme standard/BT.709 (confinés à l'intérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés ici entièrement désaturés. A l'inverse, ceux faisant partie de la gamme élargie BT.2020, exclusive au disque 4K Ultra HD Blu-ray (qui s'étendent à l'extérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés en couleur :

Qualité Vidéo

Dans le contexte du cinéma britannique, le film Le Voyeur ("Peeping Tom") de 1960, réalisé par Michael Powell, se présente comme une réalisation à la fois controversée et avant-gardiste. La réception initialement négative, caractérisée par le scandale et une certaine incompréhension, a longtemps masqué la profondeur de sa mise en scène, de sa direction photographique, et de ses innovations techniques qui ont finalement établi son statut de film culte. L'emploi novateur de la perspective subjective se distingue particulièrement pour une œuvre de cette période. L'introduction de la caméra à la première personne ne se contente pas d'engager activement le spectateur dans la narration, mais elle est aussi utilisée de manière efficace pour explorer la psychologie complexe du personnage principal, Mark Lewis, interprété par Carl Boehm. Bien que déconcertante pour son temps, cette approche crée une connexion perturbante entre le public et le personnage, tout en soulevant des questions "meta" sur notre propre participation implicite, en tant que cinéphiles, dans l'acte voyeuristique.

Hautement estimé par des réalisateurs de renom tels que Martin Scorsese, "Le Voyeur" (1960) a récemment bénéficié d'une restauration remarquable. Elle a été rendue possible grâce au financement de The Film Foundation, l'organisation fondée par le réalisateur de Taxi Driver, en collaboration avec le BFI National Archive et Studiocanal. Les négatifs originaux en 35mm ont été numérisés par les laboratoires de Silver Salt Restoration à Londres. La restauration proprement dite a été effectuée à New York par la société de production Cineric. Le film est désormais présenté en 2160p, dans un ratio d'image de 1.66:1, et offre les options HDR10 et Dolby Vision pour une expérience visuelle optimisée.

La comparaison directe avec l'édition Blu-ray antérieure de "Le Voyeur" (1960), sortie en 2010 sur le marché britannique, met en lumière l'importance et l'excellence de la restauration 4K récemment réalisée. Cette version 4K apporte un prestige considérable au film, offrant une qualité visuelle totalement honorable. Le cadrage a été soigneusement révisé, incluant des ajustements mineurs sur le plan vertical et un recentrage subtil. Le film a bénéficié d'un nettoyage complet et d'une stabilisation, résultant en une présentation exceptionnellement claire à cet égard. Le niveau de définition atteint grâce à ce nouveau scan est remarquable pour un film de cette époque, révélant des détails prodigieux. Il est vrai que les plans à effets optiques de type fondus-enchainés souffrent systématiquement d'une baisse temporaire de la définition. Cependant, pour le reste des plans, la clarté obtenue constitue une révélation. Les expressions terrifiées des victimes, le studio de photographie de Mark Lewis, et les vues d'ensemble du plateau de tournage gagnent tous en définition et en netteté, avec un résultat de premier plan. Un aspect particulièrement saisissant est la fidélité absolue du grain 35mm, qui bénéficie d'une densité robuste sur ce titre, grâce notamment à une compression vidéo HEVC de haute tenue. Studiocanal a utilisé un disque de 100 Go pour cette édition, et le taux de transfert vidéo a été optimisé, avec un bitrate moyen atteignant 91 Mbps et des pics dépassant les 120 Mbps, assurant une solidité d'ensemble favorable.

L'étalonnage des couleurs effectué en Dolby Vision contribue également de manière significative à l'excellence de la présentation. Sans recourir à une surenchère de luminosité avec des pics lumineux mesurés en moyenne à 299 nits, "Le Voyeur" bénéficie d'une plage dynamique suffisamment élargie pour enrichir l'impact visuel de nombreuses scènes. La photographie du film, déjà remarquable pour son utilisation sophistiquée de l'éclairage studio et des couleurs, s'en voit sublimée. Otto Heller, le directeur de la photographie, avait habilement manipulé les contrastes et les ombres pour générer une ambiance empreinte de tension et de suspense, essentielle à l'impact émotionnel de l'œuvre. La sélection des couleurs vives, notamment le rouge, ne se distingue pas seulement par son impact visuel frappant; elle porte aussi une dimension symbolique significative, évoquant le désir, le danger, et la mort. Cette couleur, lourde d'émotion, est employée lors de moments clés du récit et tire pleinement avantage du Wide Color Gamut (ici P3), enrichissant ainsi des scènes importantes telles que celles mettant en scène les modèles féminins photographiés ou la salle de projection du personnage principal. Des bleus vifs tirent également parti du WCG, se démarquant par leur intensité, comme dans le cas de la valise dans laquelle l'une des victimes est enfermée ou celui de la robe d'Helen Stephens.

Qualité Audio

Le mixage sonore original a bénéficié d'une restauration méticuleuse visant à offrir une expérience auditive claire et détaillée. La version originale est proposée en LPCM 2.0 (2304 kbps, sous 24 bits), tout comme les versions doublées en français et en allemand. Cette bande son, soigneusement nettoyée par le BFI, se distingue par son excellente qualité, exempte de tout bruit parasite et offrant une clarté optimale des dialogues. Le Voyeur se caractérise par l'utilisation de subtiles ambiances sonores, parmi lesquelles les gouttes d'eau dans le laboratoire du protagoniste et les bruits d'ambiance festives émanant de l'étage inférieur occupé par les autres locataires. Le son distinctif du projecteur de film est également mis en avant de manière efficace. Les sons capturés par la caméra de Mark, parfois amplifiés et déformés, plongent les spectateurs dans son point de vue subjectif. La bande originale est également remarquable pour son originalité et son apport significatif à l'impact du film, la musique s'intensifiant en parallèle à l'escalade de l'action, notamment lors des scènes de meurtre.

Bonus

- Le Voyeur par Sir Christopher Frayling
- Anna Bogutskaya et Rhianna Dhillon discutent du Voyeur
- Sélection de scène par Martin Scorsese & Thelma Schoonmaker
- Nouvelles interviews de Martin Scorsese & Thelma Schoonmaker
- The Eye of the Beholder
- The Strange Gaze of Mark Lewis
- Introduction de Martin Scorsese (2007)
- Entretien avec Thelma Schoonmaker (2007)
- Commentaire audio du Professeur Ian Christie
- Bande-annonce originale

Conclusion

Le travail de restauration effectué sur Le Voyeur (1960) est véritablement remarquable et procure une grande satisfaction. Mis à part les irrégularités observées lors des transitions par fondus enchaînés, le film jouit d'une présentation en 4K d'une stabilité et d'une définition exceptionnelles, soutenues par une compression vidéo impeccable qui assure une qualité constante du début à la fin de l'oeuvre. Ce film, d'une incroyable audace et avant-gardiste sur de nombreux aspects, méritait d'être redécouvert dans de nobles conditions, et c'est désormais chose possible. Hautement recommandé !