Test 4K Ultra HD Blu-ray : Full Metal Jacket (1987)

Publié le par la Rédaction



 

Synopsis

1968. Dans la base américaine de Paris Island, de jeunes engagés attendent de partir pour le Vietnam. Ils subissent l'entraînement des Marines sous la férule du sergent Hartman, un instructeur sadique qui prend pour tête de Turc le soldat "Baleine." Le soldat Guignol tente d'aider Baleine à sortir de son angoisse, mais Hartman décide de punir toute la chambrée, excepté Baleine.

 

 

NB : Les comparatifs image (compression .jpg, 8-bit) sont strictement à usage illustratif et sont non représentatifs de ce que l'Ultra HD Blu-ray diffusera sur votre écran UHD HDR calibré.

 

Afin de mettre en évidence l'utilisation concrète du Wide Color Gamut (WCG) sur cette édition (voir tutoriel ici), les pixels qui se situent dans la gamme standard/BT.709 (confinés à l'intérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés ici entièrement désaturés. A l'inverse, ceux faisant partie de la gamme élargie BT.2020, exclusive au disque 4K Ultra HD Blu-ray (qui s'étendent à l'extérieur du petit triangle REC.709) vous sont présentés en couleur :

 

🪖🐋  "Mon fusil, c'est mon meilleur ami. Lui, c'est ma vie."

Il y a des films de guerre... et puis il y a Full Metal Jacket (1987). Pas une œuvre sur la guerre en elle-même, mais sur ce qu'elle fait à l’homme. Un film qui ne raconte pas simplement un conflit armé, mais qui l’inocule, lentement mais sûrement dans la psyché. Stanley Kubrick ne filme pas uniquement des Marines : il observe la combustion lente de l’innocence, le feu noir qui consume l’homme pour en faire une arme. Deux actes, deux visages d’un même cauchemar : celui de la fabrication du soldat, puis, dans un second temps, celui de sa lente corrosion sur le champ de bataille.

Parris Island. L’antichambre. Le sas vers autre chose. Lieu de déconstruction totale. On y entre avec un prénom, un regard, une histoire. On en sort avec un matricule et un fusil. Le sergent Hartman, chef-instructeur dans cette institution, en est le grand prêtre. Il ne forme pas : il forge. Il ne parle pas : il éructe. Il ne voit pas des hommes, mais des matières premières à broyer pour construire des machines de guerre. Ici, on apprend à aimer son fusil plus que sa mère, à chanter des psaumes au dieu de l'acier, à effacer le "je" au profit du "nous", puis du "eux" — l’ennemi, l’autre, la cible. Les nouvelles recrues, violemment séparées de leur vie d'avant, sont livrées à ce processus de casse et de recodage. Le langage devient militaire, binaire, brutal. Les gestes se répètent jusqu’à l’absurde. L’humiliation devient outil, la douleur un rite. Et sous la sueur, sous les cris, quelque chose se brise. Et se reconstruit. Une ambiguïté glaçante que Kubrick ne cherche jamais à résoudre.

Mais la guerre, la vraie, n’a pas lieu dans les casernes. Elle surgit dans les rues dévastées de Huế, ville fantôme plantée comme dans un rêve malade. La seconde moitié du film n’est plus cadrée de la même manière. Elle erre, elle titube. Elle se perd dans un labyrinthe de ruines et de silences, ponctuée par des rires nerveux, des chansons absurdes, des morts qu’on filme de biais, comme pour ne pas déranger. Ici, la guerre n’est ni glorieuse, ni même spectaculaire. Elle est mécanique, hallucinée. Une succession de gestes, de décisions à prendre sous pression. Et parfois, une balle venue d’un recoin de l’enfer vous rappelle le caractère futile de toute l'opération.

L’humour devient noir comme si le chaos dansait sur les ruines de l’Amérique elle-même. Ce n’est pas l’horreur qu’on retient, mais l’étrange beauté d’un monde désaxé. Kubrick filme la guerre comme Coppola filmait la folie : avec cette distance trouble qui fait tout vaciller. Il ne s’agit pas de juger, mais d'afficher, dans un style presque documentaire. De poser la caméra au cœur du cyclone, et de laisser l’image parler. Une image froide, chirurgicale, presque trop nette pour être vraie.

Full Metal Jacket (1987) s’imprime dans la mémoire comme une brûlure lente. Il laisse un arrière-goût métallique, celui d’avoir assisté, impuissant, à la désintégration méthodique d’une conscience. On peut dresser des hommes à tuer, oui. Mais à la fin, il ne reste ni héros ni monstres. Juste des silhouettes fatiguées, englouties par la brume, avançant en silence avec, sur les épaules, le poids d’une humanité fracturée.

Qualité Vidéo

Full Metal Jacket (1987) a été tourné principalement en Angleterre. Pour le tournage, Kubrick a mobilisé des caméras Arriflex 35BL couplées à des objectifs sphériques (Zeiss & Nikon). Le titre avait bénéficié d'une édition Blu-ray dès 2007 (compression VC-1) chez Warner Home Vidéo. Sorti originellement en 2020, puis au gré des années sous différents packaging, l'édition Ultra HD Blu-ray de Full Metal Jacket (1987) s'appuie sur un master restauré en 4K. Tout cela sous l'intiative de Warner Bros Motion Picture Imaging, avec un récent scan des négatifs 35mm originaux et un étalonnage des couleurs HDR. Le processus a été supervisé par Leon Vitali, collaborateur de longue date de Kubrick. Il est question d'une présentation en 2160p, ratio 1.78:1, avec l'unique option HDR10.

Monument du cinéma de guerre et œuvre majeure de Stanley Kubrick, Full Metal Jacket (1987) s'offre une cure de jouvence en 4K Ultra HD Blu-ray qu'il est bien difficile de contester. D'emblée, on observe une fenêtre de scan - si ce n'est identique - en tout cas proche de celle de la précédente édition Blu-ray. Aucune portion d'image n'a été sacrifiée sur l'autel du nouveau scan. L'apport principal de ce master 4K réside incontestablement dans l'amélioration de la définition. Le bond qualitatif est remarquable et évident dès les premières minutes. Si l'on n'atteint pas nécessairement les sommets de piqué que le support 4K peut offrir (certaines séquences conservent une légère douceur inhérente au tournage), l'avancée par rapport au Blu-ray de 2007 reste hautement significative. La restitution des détails fins et des textures en tire un profit considérable. Les visages burinés des recrues et de leurs instructeurs gagnent en lisibilité : les traits marqués du Sergent Hartman (R. Lee Ermey), les expressions changeantes de "Guignol" (Matthew Modine) ou la détresse palpable de "Baleine" (Vincent D'Onofrio) sont restitués avec une acuité renouvelée. De même, les uniformes militaires révèlent une précision accrue dans le rendu des tissus, des insignes et des médailles. Le grain 35mm (qui passait mal sur la précédente édition Blu-ray), se montre bien plus fin et organique sur cette édition 4K. Pas de DNR outrancier ou abusif à déplorer. La compression vidéo reste un brin perfectible. La mobilisation d'un disque BD-100, contre BD-66 sur ce titre, aurait pu apporter un plus.

Là où cette édition 4K marque une autre rupture significative, c'est au niveau de l'étalonnage des couleurs. D'abord en raison de propositions qui diffèrent de la précédente édition Blu-ray. Cela se manifeste dans le traitement des ciels, qui arborent des nuances subtilement retravaillées, et dans la gestion des scènes nocturnes à Parris Island. Les bleus y gagnent une profondeur et une saturation accrues, enveloppant l'image d'une ambiance plus dense. L'effet est saisissant lors de la dernière nuit tragique dans la caserne, une scène marquée par cette ambiance de clair de lune toute hollywoodienne. L'usage de couleurs en WCG vient compléter ces propositions, avec des rouges et des bleus plus vifs. L'apport est évident lors de la seconde partie au Vietnam sur les éléments incandescents, comme les bâtiments en flammes, et autres drapeaux. On retrouve surtout cette même approche HDR observée sur les classiques Warner avec de fortes valeurs d'intensité lumineuse déployées. Les hautes lumières bénéficient d'un éclat remarquable. Que ce soit les reflets sur les surfaces métalliques (médailles, montures de lunettes, canons d'armes), les luminaires dans les dortoirs ou les lueurs issues des grandes fenêtres de chaque côté de la caserne. Nos mesures le confirment, avec des pics lumineux qui n'hésitent pas à franchir le seuil des 4 chiffres à plusieurs occasions et une moyenne de pics mesurée à un étonnant 591 nits.

Compte tenu des fortes intensités lumineuses déployées qui imposeront une étape de tone-mapping sur de nombreux écrans, Full Metal Jacket (1987) s'inscrit dans cette catégorie de titres où l'intégration du Dolby Vision aurait été judicieuse.

 

Test 4K Ultra HD Blu-ray : Full Metal Jacket (1987)

Test 4K Ultra HD Blu-ray : Full Metal Jacket (1987)

 

Qualité Audio

Cette édition nous propose principalement une piste en DTS-HD Master Audio 5.1 dédiée à la version originale. C'est un mixage 5.1 qui se montre efficace, notamment dans la restitution de l'acoustique particulière des baraquements. Les hurlements du Sergent Hartman résonnent avec une autorité glaçante, tandis que les réponses en chœur des jeunes recrues ("Sir, yes Sir!") emplissent l'espace sonore grâce à un enveloppement surround subtil et qui nous place au milieu des rangs. Une fois l'action transposée sur le terrain vietnamien, la piste affirme sa maîtrise des environnements sonores plus complexes et ouverts. La tension lors des affrontements, dans les ruines de Huế, est palpable. Avec ces tirs et échos qui renforcent le sentiment de danger et de chaos. Les canaux surround ne sont pas en reste, intervenant judicieusement pour élargir la scène sonore lors des échanges de tirs nourris (on pense notamment aux séquences clés autour de 55 min, 1h14 et 1h32). Le canal LFE alimente régulièrement la cacophonie des explosions, les détonations des tirs et le ballet des véhicules lors de la seconde partie. L'édition intègre aussi une VO Dolby Digital 2.0 mono, 192 kbps. Côté VF, les propositions sont identiques au Blu-ray de 2007 : Dolby Digital 5.1 (bitrate fixe de 448 kb/s).

La VO est proposée en DTS-HD Master Audio 5.1 (16-bit, 2297 kbps). L'indicateur de Loudness Range (LRA) a été mesuré en VO à 17.7 (LU).

 

Test 4K Ultra HD Blu-ray : Full Metal Jacket (1987)

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Bonus

- Commentaire Audio
- Full-Metal Jacket : le bien et le mal

Conclusion

Cette édition 4K UHD Blu-ray de Full Metal Jacket (1987) est une redécouverte complète, grâce à une définition incomparable et un étalonnage HDR moderne et authentique. Elle mérite sa place dans votre collection, que vous optiez pour l'édition simple de 2020 ou les éditions Steelbook plus récentes.